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CINQUANTIÈME-ET-UNIÈME AVENTURE.

venir ils n’auront plus de goutte et ne risqueront pas de tomber du haut mal. »

Cependant Drouineau regardoit de côté et d’autre : il avoit beau sauter de branche en branche, il ne revoyoit pas sa famille. L’inquiétude le saisit : « Renart, Renart ! où sont mes fils ? Je ne les vois pas ; où les retenez-vous ? les auriez-vous enlevés ? — Je te dis qu’ils sont en lieu sur. — Ah ! Renart, de grâce, montrez-les-moi ; Renart, où sont mes enfans ? — Ils reposent là. — Ah ! méchant, vous les avez dévorés. Vous avez mangé mes fils ! — Eh ! non. — Vous les avez mangés, traître, et voilà comme vous m’avez récompensé ! — Mais tu es fou, Drouineau ; tes fils sont envolés. — Hélas ! ils n’avoient pas encore de plumes. Renart, au nom du Dieu qui ne ment pas, engagez-moi votre foi qu’ils vivent. — Oh ! par ma foi, je le veux bien. — Hélas ! qu’est-ce qu’un serment pour toi ! tu ne crains pas le parjure. Oh ! que je voudrois te frapper, te crever les yeux ! — Voyons, descends, essaie. — Non. — Et pourquoi ? — Parce que je ne puis et que je ne le veux plus. Mais Renart, en bonne foi, dites-moi, qu’avez-vous fait de mes moineaux ? — Veux-tu absolument le savoir ? — Oui, au nom de Dieu ! — Eh bien ! au nom de moi, je les ai mangés. — Hélas ! — En vérité.