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CINQUANTIÈME-ET-UNIÈME AVENTURE.

mon cher Drouineau ! je les trouve excellentes, en vérité. » Et le petit oiseau en remplit son giron. « En voulez-vous encore, damp Renart ? — Non, grâce à Dieu, je n’ai plus faim.

— Mais damp Renart, » reprit Drouineau, « si vous me savez gré des cerises que j’ai cueillies pour vous, vous m’écouterez bien un moment, n’est-ce pas ? — Je t’écoute, ami. — Vous avez beaucoup vu, beaucoup voyagé ; vous avez retenu de beaux secrets ; mais je ne sçais si vous voudrez bien faire part de votre science à de petites gens comme nous autres. J’avoue que j’en aurois en ce moment le plus grand besoin. » Renart répondit : « Mon petit Drouineau, après la courtoisie que tu viens de me faire, je n’ai rien à te refuser, sauf, comme tu le penses bien, mon dommage. Voyons, de quoi s’agit-il ? — Écoutez-moi, damp Renart : j’ai là, près de moi, neuf moinillons qui sont tous plus ou moins affectés de goutte, et j’en suis en grande douleur. — Reprens courage, » dit Renart, « car rien ne me sera plus aisé que de les guérir, j’entends guérir tout à fait. Tu sais que j’ai demeuré deux ans au-delà des monts, à Rome, en Pouille, en Toscane, en Arménie ; j’ai quatre fois passé la mer, j’ai poussé jusqu’à Constantinople pour trouver la médecine qui conve-