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LA CHASSE AU SANGLIER.

mettent en état et le font conduire au château.

Ce n’étoit que le début de la chasse. Le Chevalier bat d’un long bâton recourbé les bruyères et les buissons ; le Veneur donne du cor, et le son retentit jusqu’aux extremités de la forêt. Réveillé par le bruit, un énorme sanglier sort d’un taillis et se met à courir au plus vîte. Un grand et fort levrier s’élance après lui, gagne sur les autres l’avance d’une portée d’arc, l’atteint, et pour le dompter essaie de le mordre à l’oreille. Le sanglier furieux tourne la dent, ouvre le flanc du levrier et le porte au pied d’un chêne sur lequel il le jete, en faisant jaillir entrailles et cervelle à la fois. Les autres chiens l’entourent avec un redoublement de rage : il leur échappe ; les buissons croisés, les rameaux entrelacés, les branches épaisses le dérobent longtemps à leur vengeance. Enfin, se voyant poussé à bout, il prend le parti de sortir du bois et de fuir du côté de la rivière. Il atteint à la falaise et tombe à plat ventre dans l’eau ; il s’y croyoit à l’abri, quand un levrier saute après lui, jette les dents à son cou, pendant que la meute entière accourt pour porter aide à leur camarade ; mais il étoit déjà trop tard : le porc l’avoit retourné et noyé sous le poids de son corps. Ce double exemple n’arrêta pas les autres ; ils nagent au-