Page:Les aventures de maître Renart et d'Ysengrin son compère, trad. Paulin, 1861.djvu/268

Cette page a été validée par deux contributeurs.
252
QUARANTE-CINQUIÈME AVENTURE.

assez de peine à rassembler mes idées, il est peu généreux de m’appeler en cour et d’abuser de ma foiblesse ; mais le Roi commande, et j’obéis. Me voici devant son faudesteuil ; il peut me mettre en chartre, me condamner au feu, à la hart ; toutefois, à l’égard d’un viellard, la vengeance seroit peu généreuse, et si l’on pendoit une bête telle que moi sans l’entendre, je crois qu’on en parleroit longtemps. »

À peine Renart avoit-il fini que le roi Noble prenant la parole à son tour : « Renart, Renart, tu sais parler et te défendre ; mais l’artifice n’est plus de saison. Maudite l’ame de ton père et de la mauvaise femme qui te porta sans avorter ! Quand tu aurois toutes les ruses de la fauve ânesse dont parle le Livre, tu n’éviterois pas la punition de tes nombreux méfaits. Laisse donc là ton apparente sécurité ; c’est de la renardie. Tu seras jugé puisque tu le demandes ; mes barons ici rassemblés décideront comment on doit traiter un felon, un meurtrier, un voleur tel que toi. Voyons, quelqu’un veut-il dire ici que ces noms ne te conviennent pas ? Qu’il parle, nous l’écouterons. »

Grimbert se leva. « Sire, » dit-il, « vous voyez que nous avons répondu à votre semonce ; nous sommes venus nous incliner