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LES ANCIENS COUVENTS DE LYON

devint plus tard ministre sous la Convention, et qui finit par se donner la mort pour éviter l’échafaud, où monta sa trop célèbre épouse. Il voulut interroger chacune des religieuses en particulier, même une bonne ancienne de quatre-vingts ans, pour laquelle on lui demandait des égards, « Êtes-vous contente ? lui demanda-t-il. — Oui. Il n’y a qu’une seule personne dont je suis mécontente. » Rolland tressaille, il croit que ses désirs vont être satisfaits, « Est-ce de votre supérieure ? — Oh ! non, certainement. — Et de qui donc ? — Eh ! monsieur, c’est de moi-même. » Rolland tourna le dos, et on l’entendit murmurer : « Que de vertus ! que de vertus ! » — On procéda à l’élection de la supérieure et de l’économe, et celles qui occupaient ces charges furent renommées à l’unanimité.

Mais la Révolution ménageait tous les jours de nouvelles surprises ; après la vente des immeubles et la confiscation des titres, on en vint aux personnes. Les chanoines furent chassés de leurs églises, l’office public fut suspendu, les prêtres furent emprisonnés, la Constitution civile du clergé fut mise à exécution. C’est le moment où Lamourette, évêque constitutionnel, fait son entrée à Lyon. Alors, pour les religieuses de la Visitation, placées entre l’autorité municipale qu’il ne faut pas irriter, et ce fantôme intrus d’autorité ecclésiastique, dont il faut se préserver, commença un nouveau genre d’épreuves. Elles ne se firent pas attendre.

Le monastère était situé sur la paroisse d’Ainay. MM. les chanoines de cette église avaient chaque année l’habitude de venir en procession à la Visitation de Bellecour pour la bénédiction des Rameaux. Quand les chanoines furent chassés, ils furent remplacés par un curé et des vicaires qui tous prêtèrent le serment. Ils vinrent au monastère demander l’autorisation de continuer les traditions des chanoines, mais à toutes leurs demandes et à toutes leurs argumentations, ils ne reçurent que cette invariable réponse : « Nous ne pouvons ni ne voulons avoir aucune communication avec vous. » La procession vint cependant au jour marqué, et grâce à la protection énergique d’un intrépide chrétien, tout se passa à peu près tranquillement, sans compromission de la part des religieuses.