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LES ANCIENS COUVENTS DE LYON

prolongées ; ses oraisons auraient été presque continuelles, et des extases les auraient accompagnées presque toujours. Quoi qu’il en soit, Jeanne-Marie Chezard de Matel avait un goût très vif pour la vie pénitente, et elle n’était plus une enfant quand elle résolut d’obéir aux ordres secrets de Dieu. Elle voulut d’abord se faire carmélite, mais le Père Jacquinot, son confesseur, prévoyant sans doute les desseins de Dieu dans cette belle âme, s’y opposa. En 1626, — elle avait alors trente ans — elle saisit l’occasion du jubilé pour commencer le nouvel institut. Le 2 juillet, elle quitta la maison paternelle et se retira avec deux compagnes, Catherine Fleurin et Marie Figent, dans une maison que les religieuses ursulines de Paris avaient abandonnée. Bientôt elles furent réduites à la misère. Jeanne de Matel partit alors pour Lyon, communiqua son dessein à Monseigneur l’archevêque, qui non seulement approuva la congrégation nouvelle, mais lui témoigna même le plaisir qu’il en ressentirait, si elle la commençait à Lyon. Elle obéit, et elle y vint demeurer avec ses compagnes. Il s’agissait de s’établir : elle reconnut, dans une maison du Gourguillon, le lieu que lui avait montré à Roanne le Verbe Incarné pour en faire sa demeure. C’est dans cette maison, dont plus bas nous dirons un mot, qu’elles se logèrent, locataires d’abord, propriétaires ensuite (1637). Sous la haute protection de Mgr Miron[1], l’ordre naissant allait prendre un heureux essor, quand cet archevêque, qui ne resta que deux ans sur le siège de Lyon, vint à mourir, et son successeur, le cardinal de Richelieu, ne voulut pas consentir, malgré l’appui du Père Milieu, jésuite, à la création d’une nouvelle institution religieuse. La situation devenait difficile et critique. Jeanne Chezard s’adressa à Rome, et en 1633, elle reçut la bulle d’érection donnée par Urbain VIII, dont nous possédons l’original aux archives de la ville. Mais le cardinal de Richelieu ne voulut pas la rendre exécutoire pour son diocèse ;

  1. La Revue du Lyonnais se trompe quand elle dit que Mgr Miron fut hostile à l’établissement nouveau. Mgr Miron était, en effet, personnellement très opposé à la création d’Instituts nouveaux, mais s’étant bientôt convaincu de la mission divine de Jeanne Matel, il l’approuva.