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LES ANCIENS COUVENTS DE LYON

puis ils partaient pour les pays infidèles afin d’acheter et de libérer les esclaves. Quelle noble mission ! Du reste, voici des chiffres plus éloquents que tous les éloges : les religieux libérateurs ont dépensé huit milliards quatre cents millions de francs pour libérer quatorze cent mille esclaves[1].

Pendant que Jean de Matha était en Espagne et à Tunis, Félix de Valois établissait un nouveau couvent à Paris, sur une partie de l’emplacement des Thermes de Julien, dans une ancienne aumônerie de Saint-Benoît, dédiée à saint Mathurin ; d’où le nom de Mathurins resta dans la suite à ces religieux. Félix de Valois mourut le 20 novembre 1212, et Jean de Matha, après deux années passées à Rome et consacrées aux œuvres de charité, mourut le 21 décembre 1213.

La règle des Trinitaires était très sévère ; elle ne leur permettait jamais l’usage du poisson, et ils ne pouvaient manger de la viande que le dimanche, encore fallait-il qu’elle leur eût été donnée en aumône ; ils ne devaient porter que des vêtements grossiers, des chemises de serge, et dans leurs voyages ne monter que des ânes, ce qui les fit appeler vulgairement frères aux ânes. En 1267, Clément IV donna son approbation à une règle moins dure, qui permettait aux Trinitaires d’acheter de la viande et de monter à cheval.

L’habillement variait en chaque pays. En France, ils avaient une soutane de serge, avec un scapulaire de même étoffe sur lequel il y avait une croix rouge et bleue. Au chœur, ils avaient l’été un surplis et l’hiver une chape avec un capuce ; dans la maison ils avaient un camail, et, lorsqu’ils sortaient en ville, un manteau noir. Cet ordre posséda environ deux cent cinquante couvents, groupés en treize provinces, dont six en France.

L’ordre tomba dans la suite dans un grand relâchement. Un point de règle consistait à consacrer le tiers des revenus des maisons de l’ordre au rachat des captifs. Par négligence ou par cupidité, cet article de la règle fut éludé dans la suite, et au xviie siècle une ré-

  1. Extrait d’anciens registres du consulat d’Alger.