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LES ANCIENS COUVENTS DE LYON

Ces grandes richesses furent aussi la source d’une lamentable décadence. Les revenus de l’abbaye sont au pillage et détournés de leur destination pieuse, les dignitaires n’ont plus souci de l’exercice de leurs charges, l’aumônier s’applique à lui-même l’argent qu’il doit distribuer aux pauvres, l’infirmier ne fournit plus ni remèdes ni soins aux malades, le devoir de l’hospitalité envers les voyageurs nécessiteux s’est transformé en banquets offerts à des amis ; les simples moines suivent l’exemple des dignitaires, ils se sont attribué des pensions, ils ont des chevaux et des domestiques ; de la vie religieuse ils n’ont pas même conservé l’habit ; ils dépouillent la robe monacale, sortent de leur cloître, courent la ville en habits séculiers, hantent les tavernes et les cabarets. Et ceux qui sont placés dans des prieurés à la campagne viennent à la ville manger joyeusement l’argent de leurs maisons.

L’autorité ecclésiastique prit des mesures énergiques et, malgré les vives résistances des coupables, fit cesser ces criants abus. Ainay revint à la pratique stricte de sa règle.

Ce ne fut que vers la fin du xiie siècle, selon le P. Colonia, mais bien avant selon d’autres, que l’ancienne discipline s’y étant tout à fait relâchée, la règle de saint Benoît fut introduite dans le monastère ; elle y subsista jusqu’à la sécularisation qui arriva en 1685.

Il y a eu à la tête de cette abbaye des abbés réguliers, des abbés commendataires et des abbés séculiers. On comprend assez ce que furent les premiers et les derniers, mais on ignore davantage ce que fut la commende. La commende était la nomination d’une personne séculière à une prébende, à un canonicat, à une abbaye ; c’était un expédient qui levait l’incompatibilité de la personne avec la nature du bénéfice. De la sorte, les commendataires percevaient les revenus de leurs charges sans en exercer les fonctions ; c’était l’ancienne formule complètement transformée : Non onus, sed munus. Quant à la règle, aux austérités de la vie monacale, à la perfection religieuse, les commendataires n’en avaient cure. À Ainay, le bâtiment abbatial, entouré de beaux jardins et magni-