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LES ANCIENS COUVENTS DE LYON

forcé qu’il est obligé de prendre, à la suite de cette double blessure, que le bon Dieu l’attend. Pour se distraire en effet de son inaction prolongée, Ignace demande des romans, il n’y en a pas là. En fait de livre, on n’a à lui offrir que la Vie des saints ; il la lit pour s’amuser, d’abord sans aucun plaisir, mais ensuite, touché par la grâce, avec beaucoup d’édification. Alors de plus violents combats se disputent son âme : d’un côté la passion de la gloire et son attachement profond pour une dame de la cour de Castille, de l’autre la vanité de la gloire humaine, le néant de la vie qu’il comprend mieux que jamais, tels sont les sentiments qui l’agitent. Mais enfin la grâce triomphe, et quand il est en état de marcher, il se rend en pèlerinage au monastère de Montserrat, fameux par une image miraculeuse de Marie, il suspend son épée à un pilier de l’église, et renonce à la milice et à la gloire mondaine ; puis désireux de passer en Terre sainte, il continue son voyage. Mais la peste sévit à Barcelone et le port est fermé : pour attendre le moment favorable, il se retire, après avoir échangé ses vêtements contre ceux d’un pauvre mendiant, dans la petite ville de Manrèse, située à trois lieues de Montserrat.

Si Manrèse est célèbre aujourd’hui, elle était, avant saint Ignace, bien inconnue : elle avait cependant un couvent de Dominicains et un hôpital, où notre converti s’empressa de se mettre au service des malades. Peu à peu on apprit que ce mendiant était un gentilhomme, et Ignace, pour échapper à la faveur populaire qui commençait à se manifester, se retira dans une grotte déserte à six cents pas de Manrèse : c’est là qu’il composa son fameux livre des Exercices spirituels, qui mérita les plus grands éloges du pape Paul III.

Quand la peste a cessé à Barcelone et que le port est ouvert, il part de Manrèse, où il séjournait depuis six mois, et passe en Palestine. Ne pouvant y rester, et comprenant que pour travailler à la conversion des âmes, il fallait avoir des connaissances qui lui manquaient, il revient à Barcelone pour y apprendre le latin, il est alors âgé de trente-trois ans. Quand il possède la langue latine, il se rend à Alcala pour y suivre le cours de philosophie.

Dès ce temps où il est élève à Barcelone et à Alcala, on peut