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LES ANCIENS COUVENTS DE LYON

la prison. D’autres, au contraire, qui avaient été si cruellement tourmentés, qu’ils ne paraissaient pas devoir prolonger leur existence au milieu de maux contre lesquels tout remède était inutile, purent encore vivre dans cet affreux séjour. Les secours humains leur manquaient ; mais le Seigneur réparait leurs forces et soutenait leur courage, en sorte que, à leur tour, ils consolaient leurs frères et ranimaient leur ardeur. Des chrétiens nouvellement arrêtés, au contraire, et peu accoutumés aux souffrances, expirèrent bientôt dans une prison dont les incommodités furent pour eux insupportables.

« Nous ne saurions passer ici sous silence la fin glorieuse du bienheureux Pothin, évêque de Lyon. Il était âgé de quatre-vingt-dix ans, faible et infirme, en sorte qu’il pouvait à peine respirer ; son zèle et le désir du martyre le soutenaient. Il fut conduit, ou plutôt porté, au tribunal au milieu des injures de tout le peuple, qui vomissait des imprécations, comme si en lui ils eussent vu Jésus-Christ même. Le gouverneur lui demanda quel était le Dieu des chrétiens : « Vous le connaîtrez, répondit-il, si vous en êtes digne. » Alors la multitude entra en fureur. Ceux qui étaient près le frappaient avec les pieds et les mains, sans aucun respect pour son âge ; ceux qui étaient loin lui jetaient tout ce qu’ils rencontraient, croyant qu’ainsi ils vengeraient leurs dieux. Le saint évêque conservait à peine un souffle de vie, quand il fut jeté dans la prison où, peu après, il expira.

« Il plut encore à Dieu de manifester l’admirable économie de sa providence et de son infinie miséricorde par un de ces contrastes qui nous révèlent jusqu’où Jésus-Christ porte pour les siens les attentions de son amour. Ceux qui avaient renié leur foi étaient renfermés dans la même prison, et souffraient les mêmes peines que les confesseurs ; seulement ceux qui s’étaient avoués chrétiens étaient jetés dans les fers en qualité de chrétiens, et non comme coupables de quelques crimes ; les apostats, au contraire, étaient détenus comme des homicides ou des scélérats. Aussi avaient-ils beaucoup plus à souffrir que les autres, dont les peines