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LES ANCIENS COUVENTS DE LYON

l’argent nécessaire pour mener à bien cette transformation. Elle mourut le 26 avril 1723, à l’âge de cinquante-sept ans. Elle aussi fut magnifique dans ses libéralités pour les malheureux. Chaque année, au 1er janvier, le Consulat venait lui apporter ses vœux et des présents ; ces présents, elle les distribuait en aumônes.

Ne quittons pas ce sujet sans parler d’une autre conquête du Carmel de Lyon, Mademoiselle Gautier, actrice de la Comédie-Française. Née à Paris en 1692, elle était comédienne à dix-sept ans, et sociétaire du Théâtre-Français à vingt-quatre. Moins remarquable par son talent que par sa beauté, elle était en même temps peintre et poète ; avec beaucoup d’esprit et un caractère impétueux, elle avait une liberté de mœurs extrême.

À trente ans, au jour anniversaire de sa naissance, elle alla entendre la messe au couvent des Cordeliers, dans la chapelle du Saint-Esprit ; là, elle prit la résolution de changer de vie. L’année suivante, elle quitta Paris, et alla à Pont-de-Vaux, au couvent des Ursulines, où elle resta dix mois. Puis, étant venue à Lyon faire visite au maréchal de Villeroy, elle remarqua le couvent de l’Antiquaille qui lui plut beaucoup ; elle s’y retira. C’est dans cette maison de la Visitation qu’elle prit la résolution de faire à Dieu le sacrifice de sa liberté ; elle en parla à Mgr François-Paul de Villeroy, qui chercha d’abord à la détourner de son projet et qui finit par y souscrire ; il demanda pour elle une place au Carmel de Lyon, qui lui ouvrit ses portes, le 14 octobre 1724.

Trois mois après, Mademoiselle Gautier recevait le saint habit de l’ordre et le nom de sœur Marie-Jeanne-Augustine de la Miséricorde ; un an après, elle faisait profession, et ses trente-deux années de vie religieuse furent trente-deux années de la plus rigoureuse pénitence ; elle devint aveugle pendant les sept-dernières années de sa vie, mais resta jusqu’à son dernier moment (1757), un sujet de profonde édification pour tous.

Après la trop fameuse exécution de Cinq-Mars et de Thou, le cadavre de ce dernier fut, par les soins de Madame de Pontac, reconduit aux Carmélites. Le cœur de cette infortunée victime de l’im-