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que l’humanité ne peut faire un pas sans tomber dans un abîme. Il y a eu de tout temps des conservateurs qui ont appelé révolutionnaires et gens dangereux pour la société ceux qui voulaient adoucir les mœurs, et diminuer les différends qui séparent les hommes. Les premiers qui ont écrit ou parlé contre la torture, dont la seule idée nous révolte aujourd’hui, furent traités de visionnaires, de gens sans principes qui voulaient renverser l’ordre établi. Les conservateurs de l’ancien empire romain ont de même envoyé aux supplices les plus épouvantables, livré aux bêtes féroces par milliers, les premiers chrétiens qui se réunissaient en secret pour se communiquer la bonne nouvelle que les hommes étaient tous frères, que les pauvres étaient les enfants de Dieu, qu’il fallait aimer son prochain comme soi-même, se secourir mutuellement ; maximes chrétiennes qui ne faisaient pas l’affaire de ces grands conquérants d’alors qui tenaient dans l’esclavage tous ceux qui étaient trop faibles pour leur résister. Mais en fait de justice, l’humanité chrétienne a fait bien d’autres progrès. Autrefois on brûlait tous ceux qu’on ne comprenait pas. Ainsi on condamnait à mort pour magie et sortilège des gens qui probablement faisaient