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Selon les doux effects de la saincte alliance
Qui me donne, y pensant, en mon mal allegeance,
Je vous seray loyal perpetuellement,
Croyez que tout ainsi que vous estes la perle
Que je tiens saincte, chere, humble, douce, fidelle,
Je seray pour jamais vostre vray Diamant.

Hé que je baise encor' ceste main, ma Deesse,
Que je baise ce doigt qui doucement me presse,
Par le neud amoureux de ma fidelité,
Ha ! ce m'est trop de bien, mon ame trop contente
S'envole de mon sang, & dans vos yeux vivante
Pour vie dans mon cœur laisse vostre beauté.


LVII.


Cependant qu'eslongné de vos yeux je souspire
Sans faveur de secours, d'esperance & de port,
J'appelle en mes regrets la bien-heureuse mort,
Qui peut seule avancer la fin de mon martyre.

Car comme sur la mer est poussé le navire,
Mon cœur est agitté par mon injuste sort,
Et l'horreur de mon mal d'un eternel effort
Entre cent mille escueils d'heure à heure m'attire :

Las ! presque je peris & contant je le veux,
Mais quand je voy la mort je fais mille humbles vœux
A la divinité pour m'estre favorable.

Ainsi je veux mourir absent de vos beaux yeux,
Et puis pour les revoir je supplie les cieux
De me prester encor ma vie miserable.


LVIII.


En mes tristes regrets je n'ay allegement
Qu'en pensant aux douceurs qui nourrissoyent ma vie,
Quand mon ame de moy heureusement ravie,
En vos rares beautez se perdoit doucement.