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De regler mes pensers selon vostre vouloir,

Si donq ma mort vous plaist, donnez m'en tesmoignage
Et pour vous obeir plain de brave courage
Vous me verrez passer l'onde du fleuve noir.


ODE I.


Je suis saisi de frayeur,
Je tremble tout dans le cœur,
Et une froideur mortelle
Passant en moy peu à peu,
Y allume un cruel feu,
Pour une beauté trop belle.

Je n'ose jetter mon œil
Aux rayons de ce soleil,
Qui peut foudroyer mon ame,
Je ne l'ose malheureux :
Voir d'une regard amoureux :
Car je mourrois en sa flame.

Je ne m'ose présenter
Pour heureux un peu tenter
Une si belle fortune,
Car mon injuste destin
Me feroit sentir ma fin,
Au bord du premier Neptune.

Si ce soleil luit sur moy
Par une agreable loy,
Il force mon ame atteinte
De ces traits, dont la rigueur
Me fait souhaitter l'erreur