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LES SÉRAILS DE LONDRES

sort ; qu’il préféroit la mort à une vie de tourments perpétuels, que la belle main de l’aimable Émilie pouvoit seule adoucir. » La jeune personne lut cette épître avec émotion ; d’un côté, sa vanité étoit en quelque sorte satisfaite d’avoir fait la conquête d’un beau jeune homme qu’elle savoit venir dans le magasin de son père ; de l’autre part, sa pitié et sa compassion la portoit à plaindre son tourment : elle consulta donc une dame en qui elle avoit confiance, pour savoir comment elle devoit agir dans une pareille circonstance. Le valet de chambre du lord L...n n’étoit pas à mépriser ; il étoit le grand favori de son maître ; rien ne se faisoit dans la maison que par ses ordres ; il dirigeoit tout, et même milord, par dessus le marché. Comme milord avoit beaucoup de crédit à la cour, Émilie ne doutoit point qu’il ne procura un fort bon emploi à son valet de chambre : dans tous les événements, elle seroit bien mariée, et c’étoit la principale chose qu’elle désiroit depuis long-tems. Elle lui fit, en conséquence, une réponse qui, quoique équivoque, lui donnoit assez d’espérance pour poursuivre cette affaire avec succès, ce qu’il ne manqua d’exécuter ; il introduisit auprès d’elle une femme qu’il faisoit passer pour sa sœur, et qu’Émilie regardoit déjà comme la sienne propre ; elle lui ouvrit donc les secrets de son cœur, qui furent aussitôt rapportés au