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LES SÉRAILS DE LONDRES

pourroit secundum artem, de noir qu’il étoit devenir blanc : en conséquence, il lut avec beaucoup d’attention tous les papiers dans lesquels il étoit question de ces remèdes, car il avoit pris la ferme résolution de ne rien épargner pour devenir un joli garçon tout à la fois.

Il fit donc une ample provision de pommade, d’eau et autres remèdes pour la beauté ; il commença sérieusement à s’occuper de cette affaire pénible. La première semaine il eut les plus grandes espérances de succès ; mais la composition du remède, étant d’une nature très corrosive, répandit sur sa peau une espèce de teigne qui lui fit imaginer que c’étoit le premier pas vers la beauté ; il fut si fier de cette attente, qu’il n’hésita pus un moment d’écrire une lettre très curieuse à Miss G...., femme très célèbre par sa beauté et jouissant de 30.000 livres sterlings. Il y a tout à la fois dans cette lettre une naïveté et une impudence qui excitera la curiosité du lecteur.

Chère Miss,

Je vous ai souvent regardé en public avec ravissement ; en effet, il est impossible de vous voir sans éprouver des émotions qui doivent animer le sentiment de tout homme. En un mot, Madame, vous avez saisi mon cœur, et j’ose vous dire que je suis votre esclave nègre. Vous vous étonnerez, Madame, de cette expression, mais j’aime à être sincère. Je suis de cette race basannée d’Adam que quelques personnes méprisent par rapport à la cou-