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LES
RAVAGEURS


I

LE LILAS CASSÉ

Pendant la nuit, il s’était levé un grand vent qui sifflait dans les trous des serrures et grondait dans le canal de la cheminée ; quelques volets non retenus par leurs agrafes battaient contre le mur. Jules s’éveilla. Il dormait cependant du calme sommeil du jeune âge, mais un fâcheux pressentiment vint peut-être en rêve lui traverser l’esprit. Jules écouta ; il entendit dans le jardin de l’oncle un bruit de feuillage froissé et de branches entre-choquées. « Ah ! mes pois de senteur, se disait-il à lui-même, mes pauvres pois de senteur, en quel état vous trouverai-je demain ! La ramée qui vous soutient sera couchée à terre. Et mes belles capucines qui commençaient à fleurir, et mes touffes de réséda, et mes giroflées toutes jaunes de fleurs ! Ah ! mon pauvre petit jardin ! » Il lui fut impossible de se rendormir. Plus jeune que lui de quelques années, Émile n’entendit rien de ce qui se passait dehors. Laissons-le