Page:Les Ravageurs, Jean-Henri Fabre.djvu/295

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

XLVI

LES ARPENTEUSES

Un jour, sur les poiriers de son jardin, l’oncle Paul pratiquait une opération dont Émile et Jules vainement cherchaient à se rendre compte. Il avait dans un pot une matière noire et visqueuse, d’odeur forte, qu’il appliquait avec un gros pinceau tout autour de la base des arbres. Ah ! comme Jean le Borgne aurait ri s’il avait vu, à travers la haie, maître Paul barbouiller de noir le pied de ses poiriers ! Il aurait eu mille fois tort, comme le prouve ce que l’oncle raconta le soir même.

Jules. — Cette espèce de poix noire et coulante que vous mettiez ce matin autour des arbres, comment l’appelle-t-on ?

Paul. — On l’appelle goudron. Cette matière se retire de la houille, ou charbon de terre. Pour fabriquer le gaz avec lequel on éclaire les villes, on met de la houille dans de grands vases en fonte, que l’on chauffe au rouge après les avoir bien fermés. La chaleur décompose la houille, qui ne peut brûler faute d’air. Les produits de cette décomposition sont le gaz propre à l’éclairage, le goudron et le coke, espèce de charbon d’aspect métallique, très poreux