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LES RAVAGEURS

Il lui est donc inutile de déménager. Comme les bêtes ne font rien d’inutile, le ver reste enfermé dans le bouton sec. Six semaines après la ponte, il en sort transformé en insecte et prend ses ébats d’un pommier à l’autre pendant toute la belle saison. Puis vient l’hiver.

Jules. — Ce doit être le moment difficile.

Paul. — Il en périt beaucoup ; mais il en reste cachés sous les mousses, dans les rides des écorces, parmi les feuilles sèches ; il n’en reste que trop pour détruire au printemps les boutons des pommiers.

L’anthonome du poirier et celui du cerisier ressemblent à celui que je viens de vous montrer. Ils ont des mœurs exactement pareilles.

Se débarrasser de ces destructeurs de fleurs n’est pas chose aisée. Si l’on n’avait à soigner qu’un petit nombre d’arbres faciles à visiter, on pourrait, à la rigueur, récolter et brûler les boutons secs habités par les larves. Par ce travail fastidieux, on sauverait quelques fruits de l’année suivante, sans jamais parvenir cependant à se délivrer des anthonomes, car ces insectes volent très bien et loin, et il en viendrait du voisinage quand il n’y en aurait plus chez vous. D’ailleurs la récolte des boutons piqués est impraticable en grand.

Jules. — Ces petits mangeurs de fleurs seront donc les maîtres dans nos vergers : ils nous détruiront en leur germe pommes et poires sans que nous puissions les détendre ?

Paul. — Ils seraient les maîtres, en effet, si nous n’avions de vigilants auxiliaires, des aides à l’œil perçant qui, de la pointe du jour au coucher du