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un peu de discussion.

me demande comment on peut déterminer le niveau mental d’un individu au moment où il a écrit une certaine lettre, si cette lettre date de plusieurs années. Je pensais me mettre en excellente posture, quand je présentais aux graphologues des lettres en me disant à part moi : « Ceci est du Taine, ceci est du Charcot, ce sont des intelligences indiscutables. » Qu’allons-nous devenir si on m’objecte : « Pardon ! ce n’est pas le Charcot idéal, l’éminent neurologiste, une création synthétique, qui n’a presque jamais existé ; c’est le Charcot du 18 janvier 1878, à 11 heures du matin. Celui-là, que valait-il, intellectuellement, moralement, physiquement ? Avait-il mal dîné la veille ? Était-il en train ? Avait-il de l’esprit ? Pouvez-vous nous le dire ? » Mais non, je ne peux pas vous le dire. Je n’en sais rien, et probablement personne n’en saura jamais rien.

Est ce que sérieusement on va nous demander de doser tous ces impondérables ?

L’objection des graphologues s’aggrave encore, quand ils ajoutent : « C’est l’écriture d’un grand homme, soit ; mais au moment où il a écrit ce billet, il était malade. » On vient de voir que c’est le moyen de défense que M. Crépieux-Jamin invoque pour pallier son erreur sur Renan.

Il faut prendre le temps de réfléchir avant d’accepter ces moyens de défense. D’abord, si nous les acceptons, quel emploi vont en faire les graphologues ? Cela est facile à deviner.

Un emploi un peu unilatéral, si j’ose dire ; ils s’en prévaudront pour les cotes où il se seront trompés, pas pour celles où leurs chiffres se confondent avec les miens. C’est donc un procédé qui améliore leurs solutions sans risquer de les avilir : au point de vue des règles expérimentales, il y a déjà là comme un défaut d’équité. Pour bien faire, on devrait rectifier tous les diagnostics, même ceux qui se trouvent exacts, en tenant compte de cette cause d’erreur ; ou même, je préférerais qu’en ce qui concerne les variations de niveau mental, on édictât quelque règle générale : par exemple, on pourrait admettre que l’intelligence de tous les jours, chez un auteur, est inférieure de deux à trois unités à celle qu’il développe dans ses ouvrages.

Quant aux abaissements de niveau que produit la maladie