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Trop avare des biens qu’il avait su défendre,
Et fait pour les sauver plus que pour les répandre,
Le papyrus, bornant leur nombre et leurs bienfaits
Du génie en Égypte enfermait les secrets.
Des prêtres de Memphis la sombre défiance
Au fond du sanctuaire exilait la science,
Lampe mystérieuse, et cachée aux mortels,
Qui brûlait solitaire à l’ombre des autels.
Tout livre était sacré, tout lecteur sacrilège :
Des épreuves d’Isis l’inévitable piège
Effrayait les regards noblement curieux
Qui voulaient pénétrer dans les secrets des cieux.
Platon forçait le temple, et d’une main hardie
Déchirait le saint voile, au risque de sa vie ;
Mais le vulgaire obscur, dont l’œil indifférent,
Quand le jour ne vient pas, reste aveugle et l’attend,
Quel sort était le sien ? Instruit à l’ignorance,
Il traînait dans les fers une docile enfance,
Abdiquait la raison, et son zèle pieux
Faisait de ses erreurs un hommage à ses dieux.

Sur les pas de ce siècle un autre siècle arrive ;
Mais le Temps marche seul. Puissante, mais captive,
La pensée arrêtée en son rapide essor,
Aigle esclave, sentait tomber ses ailes d’or,
Et la raison voyait pâlir sa clarté sainte