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Et, d’un effort terrible au jour soudain ravie,
Exhale en cris muets sa douleur et sa vie.

Vaisseau, fatal vaisseau, témoin de tant d’horreurs,
Puissent sur toi les vents épuisant leurs fureurs
Unir au fond des mers les bourreaux aux victimes !
Mais quoi ! le négrier, partout, souillé de crimes,
Sur des trésors sanglants porte une avide main.
Français, vous tous, Chrétiens, d’un commerce inhumain
Qu’à ma voix dans vos cœurs naisse l’horreur profonde.
Et vous, Rois, vous Sénat de l’Europe et du monde,
Quand, sous l’olive en fleurs reconnaissant nos droits,
Aux peuples affranchis vous promettiez des lois,
Sur ces vils trafiquants de jours de l’innocence
Votre sceptre indigné déploya sa puissance.
Achevez vos desseins. Rois, au milieu des mers,
Quel que soit leur drapeau, poursuivez ces pervers.
Quoi ! de vos pavillons au meurtre, au sacrilège,
Les lois prostitueraient l’auguste privilège !
Ah ! frappez : la patrie étouffera ses pleurs ;
Le sang, de leur bannière effaça les couleurs.
Lignez-vous, sur les flots prêtez-vous le tonnerre.
Quelle union plus sainte aux trônes de la terre
Peut du trône céleste attirer les bienfaits ?
Que l’Afrique, par vous ravie à leurs forfaits,