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L’impétueux Belmar, sans s’abaisser à plaire,
D’un insolent amour réclamant le salaire,
Obsède la captive, et souvent sa fureur
Mêle aux dons impuissants l’outrage et la terreur.
Vain espoir ! Néali, bravant sa violence,
Oppose à ses transports un dédaigneux silence.
— « Vile esclave, dit-il, te verrai-je à la fois
« Repousser mes bienfaits, insulter à mes droits ?
« Un Blanc souffrira-t-il ton mépris ou ta haine ?
— « Tes droits et tes bienfaits, lui répond l’Africaine !
« Où sont-ils ? Est-ce donc mon pays désolé ?
« Mon époux malheureux de tes fers accablé ?
« Nos tourments ? notre exil sur un lointain rivage ?
« Et mon sein désormais fécond pour l’esclavage ?
« O ma mère, en tes bras libres j’ouvris les yeux !
« Le Grand-Fleuve, aux seuls Noirs accordé par les cieux,
« Qui refuse son onde à vos mers étonnées,
« Cachait dans ses replis nos tribus fortunées.
« Épouse de Sélim, près de lui chaque jour
« Souriaient à mes vœux la fortune et l’amour.
« Ah ! j’ignorais ta race et ses trames perfides.
« Tout à coup le bruit court que, d’esclaves avides,
« Les Blancs, fils de la mer, sont venus sur nos bords
« De leurs arts séducteurs déployer les trésors.
« Les Blancs ! ce cri fatal, en cent partis contraires