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nailles ; et vous n’y verrez pas plus faire mention de l’affaire Jude Philipp que si elle n’avait jamais existé.

Pourquoi ce silence succédant brusquement à tant de tapage ? Pourquoi ? Oh ! c’est bien simple : le dénommé Philipp n’est pas juif ; c’est même un clérical à tous crins, affichant une piété édifiante et une excessive dévotion. Il avait fondé « la Compagnie des tissus antiseptiques et microbicides ». Il l’avait placée sous la protection du pape et le Souverain-Pontife n’avait pas dédaigné d’accorder sa bénédiction à l’entreprise. De plus, l’avancement de cet escroc, avancement que les canards nationalistes qualifiaient de scandaleux, n’est pas dû aux francs-macons et aux Cosmopolites, ainsi qu’on l’avait avancé ; il est dû au patronage très marqué, à la protection très spéciale de l’amiral Rieunier, qu’on sait être un nationaliste ardent et un clérical forcené, et qu’on a su, depuis, être un des gros actionnaires de la Société sus indiquée.

Vous comprenez maintenant pourquoi la presse antisémite et patriotarde est, tout d’un coup, devenue muette.

Gardez-vous toutefois de suspecter la probité et le patriotisme de cette presse. C’est uniquement poussée par ses sentiments d’honnêteté et de patriotisme qu’elle fulminait contre Jude Philipp, quand elle le croyait juif ; c’est également par patriotisme et probité qu’elle se tait, maintenant qu’elle sait que ce Philipp est un vrai Français de France.

Vous ne comprenez pas ?… Chut !… Mystère et Nationalisme !…


À BÂTONS ROMPUS[1]


J’ai reçu tout récemment la visite d’un monsieur que je ne connaissais pas.

— « Moi, me dit-il, je vous connais depuis longtemps. Il y a bien une dizaine d’années que je vous ai entendu pour la première fois. Et je puis dire que, depuis cette époque, je vous ai entendu chaque fois que l’occasion s’en est présentée ».

J’exprimai à mon visiteur tout le plaisir que je ressentais à apprendre qu’il était un de mes auditeurs assidus. J’ajoutai que cette assurance me donnait à penser qu’il partageait les idées à la propagation desquelles je me consacre.

  1. Sous ce titre, je publierai assez fréquemment de petites études sans prétention, et de forme humoristique, se rattachant à un point de doctrine ou de tactique, et contenant une critique ou un avis.