Page:Les Mille et Une Nuits, trad. Galland, Le Normant, 1806, VI.djvu/286

Cette page a été validée par deux contributeurs.
278
LES MILLE ET UNE NUITS,

et je rentrai chez moi sous prétexte de le raccommoder. Je pris si bien mes précautions, que sans que ma femme et mes enfans s’en aperçussent, je tirai dix pièces d’or de la bourse que je mis à part pour les dépenses les plus pressées, et j’enveloppai le reste dans les plis de la toile qui entouroit mon bonnet.

» La principale dépense que je fis dès le même jour, fut d’acheter une bonne provision de chanvre. Ensuite, comme il y avoit long-temps qu’on n’avoit vu de viande dans ma famille, j’allai à la boucherie, et j’en achetai pour le souper.

» En m’en revenant, je tenois ma viande à la main, lorsqu’un milan affamé, sans que je pusse me défendre, fondit dessus, et me l’eût arrachée de la main, si je n’eusse tenu ferme contre lui. Mais, hélas, j’aurais bien mieux fait de la lui lâcher, pour ne pas perdre ma bourse ! Plus il trouvoit en moi de résistance, plus il s’opiniâtroit à vouloir me l’enlever. Il me traînoit de côté et d’autre, pen-