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LES MILLE ET UNE NUITS,

criai-je dans le moment, ce que vous m’avez prédit n’est que trop vrai ! Fatale curiosité, ajoutai-je, désir insatiable des richesses, dans quel abyme de malheurs m’allez-vous jeter ! Je sens bien à présent que je me les suis attirés ; mais vous, cher frère, m’écriai-je encore, en m’adressant au derviche, qui êtes si charitable et si bienfaisant, entre tant de secrets merveilleux dont vous avez la connoissance, n’en avez-vous pas quelqu’un pour me rendre la vue ? »

« Malheureux, me répondit alors le derviche, il n’a pas tenu à moi que tu n’aies évité ce malheur ; mais tu n’as que ce que tu mérites, et c’est l’aveuglement du cœur qui t’a attiré celui du corps ! Il est vrai que j’ai des secrets : tu l’as pu connoître dans le peu de temps que j’ai été avec toi ; mais je n’en ai pas pour te rendre la vue. Adresse-toi à Dieu, si tu crois qu’il y en ait un : il n’y a que lui qui puisse te la rendre. Il t’avoit donné des richesses dont tu étois indigne ; il te les a ôtées, et il va les donner par