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LES MILLE ET UNE NUITS,

elle crut reconnoître Ganem ; mais bientôt elle se défia du rapport de ses yeux. Si elle trouva quelque chose de Ganem dans l’objet qu’elle considéroit, il lui paroît d’ailleurs si différent, qu’elle n’osat s’imaginer que c’était lui qui s’offroit à sa vue. Ne pouvant toutefois résister à l’envie de s’en éclaircir : « Ganem, lui dit-elle d’une voix tremblante, est-ce vous que je vois ? » À ces mots elle s’arrêta pour donner au jeune homme le temps de répondre ; mais s’apercevant qu’il y paroissoit insensible : « Ah, Ganem, reprit-elle, ce n’est point à toi que je parle. Mon imagination trop pleine de ton image a prêté à cet étranger une trompeuse ressemblance. Le fils d’Abou Aïbou, quelque malade qu’il pût être, entendroit la voix de Tourmente. » Au nom de Tourmente, Ganem (car c’étoit effectivement lui) ouvrit les paupières, et tourna la tête vers la personne qui lui adressoit la parole ; et reconnoissant la favorite du calife : « Ah, madame, est-ce vous ? Par