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LES MILLE ET UNE NUITS,

fois reçus chez lui, et il ne leur parloit plus. Quand il les rencontroit dans les rues, dans les places ou dans les assemblées publiques, il faisoit semblant de ne les pas voir ; il se détournoit même, pour éviter qu’ils ne vinssent l’aborder ; enfin il n’avoit plus aucun commerce avec eux. Il y avoit du temps qu’il se gouvernoit de la sorte, lorsqu’un peu avant le coucher du soleil, comme il étoit assis à son ordinaire au bout du pont, le calife Haroun Alraschild vint à paroître, mais déguisé de manière qu’on ne pouvoit pas le reconnoître.

Quoique ce monarque eût des ministres et des officiers chefs de justice d’une grande exactitude à bien s’acquitter de leur devoir, il vouloit néanmoins prendre connoissance de toutes choses par lui-même. Dans ce dessein, comme nous l’avons déjà vu, il alloit souvent déguisé en différentes manières par la ville de Bagdad. Il ne négligeoit pas même les dehors ; et à cet égard, il s’étoit fait une coutume d’aller, chaque premier jour du