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CONTES ARABES.

ces paroles ; et au milieu de ses pleurs et de ses soupirs : « Ma mère, s’écria-t-il, je connois enfin par une expérience bien douloureuse, combien la pauvreté est insupportable. Oui, je sens vivement que comme le coucher du soleil nous prive de la splendeur de cet astre, de même la pauvreté nous ôte toute sorte de joie. C’est elle qui fait oublier entièrement toutes les louanges qu’on nous donnoit et tout le bien que l’on disoit de nous avant d’y être tombés ; elle nous réduit à ne marcher qu’en prenant des mesures pour ne pas être remarqués, et à passer les nuits en versant des larmes de sang. En un mot, celui qui est pauvre n’est plus regardé, même par ses parens et par ses amis, que comme un étranger. Vous savez, ma mère, poursuivit-il, de quelle manière j’en ai usé avec mes amis depuis un an. Je leur ai fait toute la bonne chère que j’ai pu imaginer, jusqu’à m’épuiser ; et aujourd’hui que je n’ai plus de quoi la continuer, je m’aperçois qu’ils