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LES MILLE ET UNE NUITS,

seulement que n’ayant pu résister à la curiosité de voir le pays, ils s’étoient arrêtés dans quelques villes voisines.

Cependant Codadad noyé dans son sang, et peu différent d’un homme mort, étoit sous sa tente avec la princesse sa femme, qui ne paroissoit guère moins à plaindre que lui. Elle remplissoit l’air de cris pitoyables ; elle s’arrachoit les cheveux, et mouillant de ses larmes le corps de son mari : « Ah, Codadad, s’écrioit-elle à tous momens, mon cher Codadad, est-ce toi que je vois prêt à passer chez les morts ! Quelles cruelles mains t’ont réduit en l’état où tu es ? Croirois-je que ce sont tes propres frères qui t’ont si impitoyablement déchiré, ces frères que ta valeur a sauvés ? Non, ce sont plutôt des démons, qui, sous des traits si chers, sont venus t’arracher la vie. Ah, barbares, qui que vous soyez, avez-vous bien pu payer d’une si noire ingratitude le service qu’il vous a rendu ? Mais pourquoi m’en prendre à tes