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LES MILLE ET UNE NUITS,

sœurs changèrent de couleur à ce discours, et je remarquai depuis ce temps-là qu’elles n’avoient plus pour moi les mêmes sentimens qu’auparavant.

» Nous étions dans le golfe Persique, et nous approchions de Balsora, où, avec le bon vent que nous avions toujours, j’espérois que nous arriverions le lendemain. Mais la nuit, pendant que je dormois, mes sœurs prirent leur temps, et me jetèrent à la mer ; elles traitèrent de la même sorte le prince, qui fut noyé. Je me soutins quelques momens sur l’eau ; et par bonheur, ou plutôt par miracle, je trouvai fond. Je m’avançai vers une noirceur qui me paroissoit terre, autant que l’obscurité me permettoit de la distinguer. Effectivement je gagnai une plage ; et le jour me fit connoître que j’étois dans une petite isle déserte, située environ à vingt milles de Balsora. J’eus bientôt fait sécher mes habits au soleil ; et en marchant, je remarquai plusieurs sortes de fruits et même de l’eau