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LES MILLE ET UNE NUITS,

l’a déjà dit, étoit malgré lui le ministre d’une si horrible injustice, avoit deux filles, dont l’aînée s’appeloit Scheherazade, et la cadette Dinarzade. Cette dernière ne manquoit pas de mérite ; mais l’autre avoit un courage au-dessus de son sexe, de l’esprit infiniment, avec une pénétration admirable. Elle avoit beaucoup de lecture et une mémoire si prodigieuse, que rien ne lui étoit échappé de tout ce qu’elle avoit lu. Elle s’étoit heureusement appliquée à la philosophie, à la médecine, à l’histoire et aux arts ; et elle faisoit des vers mieux que les poètes les plus célèbres de son temps. Outre cela, elle étoit pourvue d’une beauté extraordinaire ; et une vertu très-solide couronnoit toutes ses belles qualités.

Le visir aimoit passionnément une fille si digne de sa tendresse. Un jour qu’ils s’entretenoient tous deux ensemble, elle lui dit : « Mon père, j’ai une grâce à vous demander ; je vous supplie très-humblement de me l’accorder. » « Je ne vous la refuse-