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CONTES ORIENTAUX

— Que dites-vous, ma princesse ? m’écriai-je à ces derniers mots. Eh ! comment pourrai-je avoir cette réputation-là ? — Vous n’avez, dit-elle, qu’à suivre exactement toutes les instructions que je vous donnerai. » En parlant de cette manière elle entra dans une garde-robe, d’où elle sortit un moment après, tenant entre ses bras un habit de derviche, une ceinture, avec une petite boîte d’ébène : « Voici, dit-elle, tout ce qui vous est nécessaire pour venir à bout de votre entreprise. Emportez cela, et marchez vers la ville de Cachemire qui n’est pas bien loin d’ici ; mais, avant que d’y entrer, arrêtez-vous, ôtez vos habits, et vous frottez tout le corps avec la graisse qui est dans cette boîte. Puis vous prendrez cet habit de derviche et cette ceinture magique dont vous vous ceindrez les reins, après quoi présentez-vous aux portes de la ville. Vous y trouverez des gardes qui vous diront : « Ô vénérable religieux ! D’où venez-vous ? » Répondez-leur : « Je suis prêtre et je viens des extrémités de l’Occident en pèlerinage à Cachemire pour voir le grand Kesaya. »

« Vous saurez, poursuivit-elle, que ce Kesaya est une célèbre idole que les peuples de ce royaume adorent. Dès que vous leur aurez dit que vous venez de si loin pour adorer cette idole, ils se jetteront à vos pieds, et vous mèneront avec respect devant Togrul-Bey, leur roi, qui vous mettra entre les mains du grand-prêtre Ahran, chef du temple de Kesaya. Ce grand-prêtre et tous les autres ministres de l’idole vous conduiront à la pagode, qui, pour la beauté et la magnificence, est au-dessus de tous les palais du monde ; mais il est entouré d’un fossé profond de vingt coudées, rempli d’une eau qui bout sans feu, et au delà du fossé il y a une plate-forme de lames d’acier