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LES MILLE ET UN JOURS

en fut alarmé ; il fit venir de nombreux médecins qui dirent tous, après avoir bien observé Farrukhschad, que sa maladie était telle qu’on n’en pouvait savoir la cause que de lui-même.

Le roi le pressa fort de la découvrir ; mais ne pouvant lui arracher son secret, il m’envoya chercher. « Symorgue, me dit-il, je sais que mon fils n’a rien de caché pour vous ; allez le voir, engagez-le à vous ouvrir son âme, et ne vous faites point ensuite un scrupule de me venir révéler ce qu’il vous aura dit. — Non, sire, lui répondis-je, comme il n’est malade que parce qu’il s’obstine à taire le sujet de son chagrin, je me garderai bien de ne vous le pas dire. Je prends trop d’intérêt à sa vie pour ne lui pas faire cette trahison. — Allez donc l’entretenir, reprit le roi, j’attends votre retour avec beaucoup d’impatience. »

Je courus à l’appartement du prince, qui laissa paraître quelque joie à ma vue, et me fît d’obligeants reproches : « Ô mon cher ami, me dit-il, je me plains de toi : depuis que je suis malade, je ne t’ai point vu ; pourquoi as-tu tant tardé à me venir voir ? J’ai déjà reçu mille visites importunes : hélas ! les tiennes seules peuvent m’être agréables dans l’état où je suis. — J’étais à la chasse, lui dis-je, et je ne fais que d’arriver ; mais qu’avez-vous donc, mon prince ? Dans quelle langueur est-ce que je vous retrouve ? D’où vient que votre teint a déjà perdu une partie de son éclat ? — Symorgue, répondit le prince après avoir fait sortir tous les officiers qui étaient dans sa chambre, je n’ai jamais eu de secrets pour toi ; loin de vouloir te cacher la cause de mon mal, je t’attendais pous te l’apprendre. Croirais-tu, mon ami, que l’état dans lequel tu me vois fut l’ouvrage d’un songe ? —