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CONTES ORIENTAUX

Demeurez toutes deux dans cet endroit ; si je ne viens pas vous retrouver dans une heure, ce sera une marque que je n’aurai pas réussi dans mon dessein. » En achevant ces mots, il tira son sabre et entra dans le jardin de la magicienne. Après son départ, Farrukhnaz et sa nourrice se sentirent terriblement agitées. « Ah ! malheureux derviche, disait Farrukhnaz, que vas-tu devenir ? Je crains que tu ne perdes la vie. — Hé, ma princesse, dit Sutlumemé, n’appréhendez rien : le chef du temple de Kesaya peut-il succomber sous les coups d’une magicienne ? Non, non, quelque périlleuse que soit l’entreprise qu’il a formée, ne doutez pas qu’il n’en sorte heureusement. »

En effet, au bout d’une heure elles le virent revenir. Il les aborda d’un air riant, et leur dit : « Grâces au Tout-Puissant, Mehrefza ne saurait plus nous nuire, et ce séjour, que la cruelle rendait terrible par ses enchantements, n’a plus que des plaisirs à nous offrir. Mais il est temps, belle princesse, de vous faire connaître qui je suis. Ne me regardez plus comme un derviche, comme le chef de la pagode de Cachemire, voyez en moi le confident du prince Farrukhschad. Je vais vous conter son histoire et la mienne en peu de mots ; après cela nous entrerons dans le palais de Mehrefza, où vous serez reçue comme vous le méritez, et où vous verrez des choses qui vous surprendront.

Le grand roi qui tient aujourd’hui la Perse sous sa puissance, et sa cour à Chiras, a pour héritier un fils unique, appelé Farrukhschad[1]. Un jour ce jeune prince, dont le mérite est accompli, tomba malade. Son père qui l’aime avec toute la tendresse imaginable,

  1. C’est-à-dire : Heureuse joie.