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LES MILLE ET UN JOURS

nuit dans le temple, et consulter Kesaya sur ce qu’il faut que vous fassiez pour parvenir au comble de vos vœux ; je vous apprendrai demain sa réponse. » Farrukhnaz se retira fort occupée du prince Farrukhschad ; elle rappela cent fois dans sa mémoire ce songe où il lui avait paru si amoureux ; elle s’en retraçait les traits autant qu’il lui était possible de s’en ressouvenir ; et, à mesure qu’elle se sentait plus de penchant pour lui, elle se le peignait encore plus charmant. Elle fut très inquiète le reste de la journée, et elle ne put reposer un moment de toute la nuit.

D’abord que le jour parut, elle se leva pour aller retrouver le derviche, qui s’aperçut bien en la voyant qu’elle n’avait pas l’esprit tranquille. Elle n’attendit pas qu’il lui apprît la réponse de Kesaya. « Eh bien, mon père, lui dit-elle, le ciel a-t-il réglé ma destinée ? vous a-t-il fait connaître tout ce qu’il exige de mon obéissance ? — Oui, ma fille, répondit le saint homme, le grand Kesaya m’a parlé ; il veut que vous vous engagiez par serment à faire tout ce que je vais vous ordonner. » La princesse jura qu’elle exécuterait exactement ses ordres. « Il faut donc, dit-il, que nous partions cette nuit. Je vous conduirai dans les États du prince qui vous aime, et qui vous donnera avec sa foi une couronne plus riche que celle de Cachemire. Vous êtes sans doute étonnée que je vous propose un enlèvement, mais Kesaya le veut ainsi.

— Hé quoi ! interrompit Farrukhnaz fort surprise, il ordonne que, sans la participation du roi mon père, je quitte la cour de Cachemire pour aller chercher un prince qui n’est pas encore mon époux ! — Je ne dis pas cela, répondit le grand-prêtre : Togrul-Bey saura notre départ ; je me charge de l’y faire consentir ; mais Kesaya juge à propos que les choses se fassent de