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LES MILLE ET UN JOURS

sur le bord de la mer. D’abord qu’ils aperçurent Repsima sur les eaux, et qu’ils la virent aborder heureusement à leur île, ils regardèrent cela comme un miracle. Ils l’environnent tous et lui font mille questions. Pour mieux satisfaire leur curiosité, elle leur conte ses aventures, et les conjure de lui accorder un asile pour vivre tranquillement. Les habitants, charmés de sa beauté, de son esprit et de sa vertu, lui donnèrent une retraite, où elle passa quelques années en prières.

Les habitants de l’île ne pouvaient assez admirer la vie austère qu’elle menait. Ils ne s’entretenaient que de l’étrangère et de la pureté de ses mœurs : elle devint même bientôt leur oracle. Quand quelques-uns d’entre eux voulaient faire un long voyage ou formaient quelque autre entreprise, avant que de l’exécuter, ils ne manquaient pas de l’aller consulter, et elle leur en prédisait le succès. Enfin elle s’acquit l’estime de tout le monde, ou plutôt on la regardait comme une divinité. La reine de l’île conçut tant d’amitié pour elle, que ne croyant pouvoir mieux faire que de la donner pour souveraine à ses peuples, elle la déclara son héritière, ce qui fut approuvé de tous les habitants. La reine était d’un âge fort avancé ; elle mourut bientôt. Repsima fit quelque difficulté de prendre sa place ; mais les peuples l’y obligèrent, et ils n’eurent pas sujet de s’en repentir, car elle les rendit si heureux qu’ils bénirent dans la suite le naufrage qui l’avait jetée sur leurs bords.

Dès qu’elle fut sur le trône, elle s’appliqua tout entière au gouvernement de l’État. Elle choisit des vizirs aussi intègres qu’éclairés, et elle eut un soin tout particulier de faire rendre justice à tout le monde. Elle employait à la prière tous les moments que lui