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CONTES ORIENTAUX

vieille y consentit, et lui donna une petite chambre. Alors la femme de Temim tira de sa bourse un sequin, et le mettant dans la main de son hôtesse : « Tenez, ma bonne mère, lui dit-elle, allez chercher de la provision pour notre souper. » La vieille sortit, et revint peu de temps après avec des dattes, des confitures sèches et liquides, et elles commencèrent toutes deux à manger. Après le souper, Repsima conta son histoire à la vieille, qui en fut touchée : ensuite elles se couchèrent.

Le jour suivant la femme de Temim eut envie d’aller au bain ; la vieille l’y accompagna. Comme elles étaient toutes deux en chemin, elles virent un jeune homme qui avait les mains liées et une corde au cou ; le bourreau le conduisait au supplice, et une foule de peuple le suivait. Repsima demanda quel crime avait commis ce jeune homme ; on lui dit que c’était un débiteur, et que la coutume de cette ville était de pendre ceux qui ne payaient pas leurs dettes. « Et combien doit celui-là ? dit la femme de Temim. — Il doit soixante sequins, lui répondit un habitant ; si vous voulez payer pour lui, vous lui sauverez la vie. — Très volontiers, repartit-elle en tirant sa bourse ; à qui faut-il donner l’argent ? » Aussitôt on fit savoir au cadi, qui accompagnait le jeune homme à la mort, qu’une dame s’offrait à payer pour le débiteur. On fit venir le créancier ; Repsima lui compta soixante sequins, et le jeune homme fut mis en liberté sur-le-champ. Tout le peuple, charmé de la générosité de l’étrangère, s’empressa de savoir qui elle était, ce qui fut cause qu’au lieu de se rendre aux bains publics, elle prit congé de sa vieille hôtesse, et sortit de la ville pour se dérober à l’importune curiosité des habitants.