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LES MILLE ET UN JOURS

je juge de toi par moi-même. Je crois que mes intérêts ne te sont pas moins chers que les tiens propres. — Oui, mon frère, répondit Revendé, vous avez bien raison d’avoir une entière confiance en moi, et il n’est pas en effet besoin de me recommander vos intérêts. Le sang et l’amitié ne me permettront pas de les négliger. »

Sur l’assurance que Revendé donnait à Temim d’avoir grand soin de sa maison, celui-ci partit de Basra et s’embarqua sur le golfe, dans un vaisseau qui allait à Surate. Dès qu’il fut parti, son frère se rendit dans sa maison et fit mille protestations de service à Repsima, qui le reçut fort bien. Revendé, par malheur, devint éperdument amoureux de sa belle-sœur. Il cacha quelque temps son amour ; mais insensiblement il n’en fut plus le maître, et il le déclara. La dame, quoique irritée de l’audace de son beau-frère, lui parla avec douceur et le pria de ne lui plus tenir de pareils discours. Elle lui représenta l’outrage qu’il faisait à Temim, et le peu de fruit qu’il devait attendre de ses coupables sentiments.

Revendé, voyant que sa belle-sœur prenait la chose si doucement, ne désespéra pas de la réduire, et devint plus hardi : « Ô ma reine, lui dit-il, tout ce que vous me pourriez dire là-dessus serait inutile ; écoutez plutôt mes soupirs et recevez mes services. Je me ceindrai de la ceinture de l’esclavage et je serai votre esclave jusqu’à la mort. Soyons d’accord ensemble, et que notre intelligence soit si secrète que nous puissions être à l’abri de la médisance. » À ce discours Repsima ne put retenir sa colère : « Ah scélérat ! s’écria-t-elle, tu ne te soucies que de cacher ton crime aux yeux du monde ; tu ne crains que d’être déshonoré parmi le peuple : tu ne te mets nullement