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CONTES ORIENTAUX

cinquante sequins, voilà votre somme complète. Allez la risquer de nouveau, et revenez ici dans six mois. »

XCIX

Le Bagdadin ne fut pas moins surpris de ce discours que la première fois. « Quelle est donc la pensée de Nasiraddolé ? Est-ce ainsi qu’il prétend s’acquitter envers moi ? Croit-il par là payer le sacrifice que je lui ai fait de ce que j’avais de plus cher au monde ? Ne devrait-il pas avoir honte de me donner cinquante sequins ? Est-ce un présent qui soit digne de lui ? Je veux pourtant encore, poursuivit-il, faire ce qu’il m’ordonne. Je reviendrai dans ce palais au temps marqué ; mais ce sera pour la dernière fois, si je n’y suis pas reçu d’une autre manière. »

Il acheta de nouvelles marchandises, et se mit à trafiquer, ce qu’il fit avec tant de bonheur, qu’au bout de six mois il se trouva qu’il avait gagné près de cent sequins. Il ne manqua pas de se rendre au palais du roi. Le trésorier vint le recevoir et lui demanda s’il avait ses deux cents sequins. « J’en ai près de trois cents, répondit le Bagdadin ; la fortune cette fois-ci m’a été très favorable. — Puisque cela est ainsi, répliqua le trésorier, je vais vous conduire au roi. Il ne fera aucune difficulté de vous voir. » À ces mots, il prit le jeune marchand par la main et le mena au cabinet de Narisaddolé. Dès que ce prince aperçut Abderrahmane, il se leva pour le recevoir, et après l’avoir embrassé à plusieurs reprises : « Ô mon cher ami, lui dit-il, je ne doute point que vous n’ayez