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CONTES ORIENTAUX

avaient fait leur déposition de bonne foi ; cependant, comme il avait déjà fait raser la maison de l’accusé et confisquer tous ses biens, il ne voulut pas faire soupçonner sa prudence. Il ordonna au cadi de faire chercher Abderrahmane aux environs de Bagdad.

Tandis que le lieutenant du cadi parcourait la campagne avec ses archers, le jeune marchand de Bagdad se tenait caché chez son ami, et jugeant par les soins qu’on prenait de le chercher que son affaire allait mal, il craignait que le cadi ne le vint surprendre dans le lieu où il était ; c’est pourquoi il forma le dessein d’aller à Moussel. « Je serai là, disait-il, dans un asile assuré ; pourvu que je puisse me rendre à la cour de Nasiraddolé, ce prince m’aura bientôt fait oublier ma disgrâce. »

Dès qu’il sut que les archers, fatigués d’avoir fait des perquisitions inutiles, étaient revenus à Bagdad, il en sortit une nuit, monté sur un fort beau cheval que lui donna son ami, et il prit le chemin de Moussel. Il fit tant de diligence qu’il y arriva en peu de temps. Il descendit au premier caravansérail, où il laissa son cheval, et ensuite il se rendit à la cour. Tous les officiers du roi le reconnurent. « Hé ! voilà, s’écrièrent-ils, l’étranger que notre monarque chérit tant ! Qu’il soit ici le bienvenu. » Dans un moment le bruit de son arrivée se répandit dans le palais et parvint aux oreilles de Nasiraddolé. Aussitôt ce prince fit appeler son trésorier et lui dit tout bas : « Allez trouver Abderrahmane, donnez-lui de ma part deux cents sequins d’or. Dites-lui qu’il les fasse valoir dans le commerce, qu’il sorte de mon palais et qu’il n’y revienne que dans six mois.

Le trésorier s’acquitta sur-le-champ de sa commission, qui surprit étrangement le Bagdadin. C’était, en