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CONTES ORIENTAUX

cesse le repos de ma vie. » La belle esclava, en achevant ces paroles, fondit en pleurs et poussa des sanglots dont Nasiraddolé fut vivement touché. « Ah, charmante Zeineb ! s’écria-t-il, modérez votre affliction, je vous en conjure, et laissez-moi du moins me flatter que le temps et mes soins en pourront triompher. Ne m’ôtez pas cette espérance qui peut seule soutenir ma vie. »

Le roi de Moussel ne se contenta pas de tenir ce discours à la belle esclave, il se jeta à ses genoux, et ajoutant à ce qu’il venait de dire mille autres choses tendres et passionnées, il fit tous ses efforts pour la consoler, mais il n’en put venir à bout ; il s’aperçut même que plus il combattait sa douleur, puis elle semblait augmenter, ce qui fut cause qu’il se retira. Il aima mieux s’éloigner de Zeineb que d’aigrir ses maux par sa présence.

Revenons au jeune marchand de Bagdad. Après le départ de sa belle esclave, il tomba dans une langueur que rien ne pouvait dissiper. Il avait beau faire des parties de plaisir, Zeineb, qu’il avait toujours dans l’esprit, ne lui permettait pas d’être content. « Ah ! malheureux que je suis, disait-il souvent en lui-même, je sens que je ne puis vivre sans Zeineb : devais-je en céder la possession au roi de Moussel ! N’est-ce pas passer les bornes de l’amitié que de livrer à son ami une personne qu’on adore ? Nasiraddolé aurait-il fait le même effort en ma faveur ? Non, sans doute, et je suis persuadé qu’il ne connaît pas tout le prix du sacrifice que je lui ai fait. Il s’imagine que j’aimais faiblement ma belle esclave, je la lui ai donnée, même sans qu’il me l’ait demandée. En effet, quel amant heureux et bien touché a jamais renoncé à sa maîtresse, par pitié pour un ami ! Cependant j’aime