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CONTES ORIENTAUX

maison pour vous interroger en présence de Danischemende, dont il est accompagné. Ce docteur soutient qu’il vous a rendu les sequins que votre époux lui a prêtés. Le grand vizir, qu’on a informé de cette affaire, a chargé le cadi de l’approfondir dès cette nuit pour lui en rendre compte demain matin. »

Là-dessus Arouya eut recours aux larmes, et pria le gouverneur de vouloir bien se cacher, en lui disant : « Monseigneur, je vous conjure d’avoir pitié de moi. Le cadi, Banou et Danischemende vont venir ici. Épargnez-moi la honte de passer pour une femme infidèle. Ayez quelque égard à la faiblesse que j’ai pour vous. Entrez dans mon cabinet, et permettez que je vous enferme dans un coffre pour quelques instants. » Comme le vieux seigneur marquait avoir quelque répugnance pour ce qu’on lui proposait, la dame se jeta à ses pieds et eut enfin le pouvoir de le persuader.

Le gouverneur fut donc mis dans le troisième coffre. Alors la femme du marchand ferma le cabinet et alla trouver son mari pour lui conter tout ce qui s’était passé. Après s’être tous deux réjouis aux dépens de trois amants infortunés, Banou dit : « Eh ! de quelle manière prétendez-vous dénouer cette aventure ? — Vous le saurez demain, répondit Arouya. Souvenez-vous seulement que je vous ai promis de nous venger d’une manière éclatante, et soyez assuré que je vous tiendrai parole. »

En effet, le jour suivant elle se rendit à mon palais, et se glissa dans la salle où je donnais audience à mes peuples. Aussitôt que je l’aperçus, son air noble et la beauté de sa taille attirèrent mon attention. Je la fis remarquer à mon grand vizir. « Voyez-vous, lui dis-je, cette femme bien faite ? Dites-lui de s’approcher