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CONTES ORIENTAUX

état est réduit l’infortuné Banou. » En même temps, elle lui représenta la mauvaise situation des affaires de son mari et lui dit les raisons qui l’obligeaient à le venir chercher.

LXXXVI

Le gouverneur, sachant de quoi il était question, fut fort prompt à promettre qu’il emploierait son autorité à contraindre le docteur Danischemend à payer ce qu’il devait à Banou ; mais il ne fut pas plus généreux que le cadi. « Je vous accorde ma protection, dit-il à la jeune femme : j’enverrai chercher l’alfakih, et s’il ne restitue pas de bonne grâce les mille sequins qu’il a reçus, il pourra bien s’en repentir. En un mot, je m’engage à vous les faire rendre, pourvu que, dès ce moment, vous commenciez à reconnaître ce que je prétends faire pour vous ; car nous autres seigneurs nous voulons que la reconnaissance précède le service. »

Comme la belle Arouya n’avait pas plus d’envie de contenter la passion du gouverneur que celle des autres, elle se retira toute désolée. « Ô Banou ! dit-elle à son mari, il ne faut plus compter sur rien. Personne ne veut entrer dans nos peines, ni nous secourir en quelque manière que ce soit. » Ces paroles mirent le vieux marchand au désespoir. Il fit mille appréciations contre les hommes, et il allait les renouveler, quand sa femme lui dit : « Cessez de maudire les auteurs de nos maux. Quel soulagement recevez-vous des plaintes vaines qui vous échappent ? Il vaut mieux rêver à d’autres moyens de