Page:Les Mille et Un Jours, trad. Pétis de la Croix, 1919.djvu/318

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
302
LES MILLE ET UN JOURS

ne sait de quelle main ce coup est parti. Pendant qu’on en cherche l’auteur, je m’élève jusqu’aux nues, et laisse tomber une grêle de pierres sur la tente royale et aux environs. Quelques soldats en sont blessés, et s’écrient qu’il pleut des pierres. Cette nouvelle se répand, et pour la confirmer je jette partout des cailloux. Alors, la terreur s’empara de l’armée ; l’officier comme le soldat crut que le prophète était irrité contre Cacem, et qu’il ne déclarait que trop sa colère par ce prodige. Enfin les ennemis de Bahaman prirent l’épouvante et la fuite ; ils se sauvèrent même avec tant de précipitation, qu’ils abandonnèrent leurs équipages et leurs tentes, en criant : « Nous sommes perdus, Mahomet va nous exterminer tous. »

LXXXII

Le roi de Gazna fut assez surpris à la pointe du jour, lorsqu’au lieu de se voir attaqué, il s’aperçut que l’ennemi se retirait. Aussitôt il le poursuivit avec ses meilleurs soldats. Il fit un grand carnage des fuyards, et atteignit Cacem, que sa blessure empêchait d’aller fort vite. « Pourquoi, lui dit-il, es-tu venu dans mes États contre tout droit et raison ? Quel sujet t’ai-je donné de me faire la guerre ? — Bahaman, lui répondit le roi vaincu, je m’imaginais que tu m’avais refusé ta fille par mépris, et j’ai voulu me venger. Je ne pouvais croire que le prophète Mahomet fût ton gendre ; mais je n’en doute point présentement, puisque c’est lui qui m’a blessé et qui a dissipé mon armée.