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LES MILLE ET UN JOURS

s’opposer à son passage, s’avança en diligence vers la ville de Gazna, et trouva l’armée de Bahaman retranchée dans la plaine devant le château de la princesse Schirine. Le dessein de cet amant irrité était de l’attaquer dans ses retranchements ; mais comme ses troupes avaient besoin de repos, et qu’il n’arriva que sur le soir dans la plaine, il remit l’attaque au lendemain matin.

Cependant le roi de Gazna, instruit du nombre et de la valeur des soldats de Cacem, commença de trembler. Il assembla son conseil, où le courtisan qui s’était blessé en tombant de cheval parla dans ces termes : « Je suis étonné que le roi paraisse avoir quelque inquiétude en cette occasion. Quelles alarmes, je ne dis pas Cacem, mais tous les princes du monde ensemble, peuvent-ils causer au beau-père de Mahomet ? Votre Majesté, sire, n’a qu’à s’adresser à son gendre. Implorez le secours du grand prophète, il confondra bientôt vos ennemis ; il le doit, puisqu’il est cause que Cacem est venu troubler le repos de vos sujets. »

Quoique ce discours ne fut tenu que par dérision, il ne laissa pas d’inspirer de la confiance à Bahaman. « Vous avez raison, dit-il au courtisan, c’est au prophète que je dois m’adresser ; je vais le prier de repousser mon superbe ennemi, et j’ose espérer qu’il ne rejettera pas ma prière. » À ces mots, il alla trouver Schirine : « Ma fille, lui dit-il, demain, dès que le jour paraîtra, Cacem doit nous attaquer, je crains qu’il ne force nos retranchements ; je viens ici prier Mahomet de nous secourir. Employez tout le crédit que vous avez sur lui, pour l’engager à prendre notre défense. Unissons-nous ensemble pour nous le rendre favorable. — Seigneur, répondit la princesse, il ne sera pas