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CONTES ORIENTAUX

Je remerciai le roi de ses bontés, et le priai de ne me savoir pas mauvais gré si je refusais l’honneur qu’il me voulait faire. Je lui dis les raisons qui m’avaient obligé de m’éloigner du Caire ; je lui confessai que je ne pouvais me détacher de l’image de Bedy-Aljemal, ni cesser de nourrir une passion inutile : « Voudriez-vous, ajoutai-je, donner votre fille à un homme dont elle ne peut posséder le cœur ? Ah ! seigneur, la princesse Malika mérite un sort plus heureux. — Hé ! comment donc, reprit le roi, puis-je reconnaître le service que vous m’avez rendu ? — Sire, lui repartis-je, j’en suis assez payé. L’accueil que Votre Majesté m’a fait, le plaisir seul d’avoir délivré la princesse de Sérendib des mains du génie qui l’avait enlevée, est une assez grande récompense pour moi. Tout ce que j’attends de votre reconnaissance, c’est un vaisseau qui me conduise à Basra. »

Le roi fit ce que je souhaitais, il ordonna qu’on remplît un vaisseau de provisions et qu’on le tint prêt à partir quand je le jugerais à propos. Cependant il m’arrêta encore quelque temps dans sa cour, et il me disait tous les jours qu’il était fâché que je ne voulusse pas demeurer à Sérendib. Enfin le jour de mon départ arriva : je pris congé du roi et de la princesse, qui me firent mille amitiés, et je m’embarquai. Nous essuyâmes sur la route plusieurs tempêtes capables de nous faire naufrage ; mais la vertu de mon anneau nous empêcha d’être submergés. Ainsi, après une longue navigation, j’arrivai heureusement à Basra, d’où je me rendis au grand Caire avec une caravane de marchands d’Égypte.

Je trouvai beaucoup de changement à la cour ; mon père ne vivait plus, et mon frère était sur le trône. Le nouveau sultan me reçut d’abord en homme qui