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CONTES ORIENTAUX

Sérendib, je vous ai vue au bain, vous m’avez charmé. Voilà une belle princesse, ai-je dit, ce serait dommage qu’elle fit le bonheur d’un enfant d’Adam, elle mérite bien l’attachement d’un génie ; il faut que je l’enlève et que je la transporte dans une île déserte. Ainsi, princesse, oubliez le roi votre père, et ne songez qu’à répondre à mon amour. Rien ne vous manquera dans ce château ; j’aurai soin de vous y fournir toutes les choses dont vous aurez besoin. »

LXXIII

Pendant que le génie me tenait ce discours, je ne fis que pleurer et me lamenter. « Infortunée Malika, me disais-je, est-ce là le sort qui t’était réservé ? Le roi mon père ne m’a-t-il donc élevé avec tant de soin, que pour avoir la douleur de me perdre si désagréablement ? Hélas ! il ne sait point ce que je suis devenue, et je crains que ma perte ne lui soit funeste. — Non, non, me dit le génie, votre père ne succombera point à son affliction ; et pour vous, ma princesse, j’espère que vous vous rendrez aux marques de tendresse que je prétends vous donner. — Ne vous flattez point, lui dis-je, de cette fausse espérance ; j’aurai toute ma vie une aversion pour mon ravisseur. — Vous changerez de sentiment, reprit-il, vous vous accoutumerez à ma vue et à mon entretien ; le temps produira cet effet. — Il ne fera point ce miracle, interrompis-je avec aigreur, il augmentera plutôt la haine que je me sens pour vous. »