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LES MILLE ET UN JOURS

Après qu’elle eut achevé ce récit, qui augmenta l’étonnement du roi : « Voilà, seigneur, lui dit-elle, un secret que je n’avais pas dessein de vous révéler, et que la seule indiscrétion de mon amant m’arrache. Après cet aveu, que je ne fais pas ici sans une extrême confusion, je vous prie instamment d’ordonner qu’on m’ôte promptement la vie ; c’est l’unique grâce que je demande à votre majesté.

— Madame, lui dit le roi, je révoque l’arrêt de votre trépas ; je suis trop équitable pour ne vous point pardonner votre infidélité ; ce que vous venez de me raconter me la fait regarder d’un autre œil ; je cesse de me plaindre de vous, et je vous rends même libre : vivez pour Hassan, et que l’heureux Hassan vive pour vous ; je donne aussi la vie et la liberté à Schapour et à votre confidente. Allez, parfaits amants, allez passer ensemble le reste de vos jours, et que rien ne puisse jamais arrêter le cours de vos plaisirs. Pour toi, traître, continua-t-il, en se tournant vers le faquir, tu seras puni de ta trahison. Cœur bas et envieux, tu n’as pu souffrir le bonheur de ton ami, tu es venu toi-même le livrer à ma vengeance. Ah ! misérable, c’est toi qui serviras de victime à ma jalousie. » À ces mots, il ordonna au grand-vizir d’emmener le faquir, et de le mettre entre les mains des bourreaux.

Pendant qu’on allait faire mourir ce scélérat, nous nous jetâmes, Zélica et moi, aux pieds du roi de Candahar ; nous les mouillâmes de nos larmes dans les transports de reconnaissance et de joie qui nous animaient, et enfin nous l’assurâmes que, sensibles à sa bonté généreuse, nous en conserverions un éternel souvenir ; nous sortîmes ensuite de son appartement avec Schapour et Calé-Cairi ; nous prîmes le chemin