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CONTES ORIENTAUX

cause que nous nous séparons ; tu devais te contenter de voir Zélica et de jouir d’une si belle vue. »

Comme j’avais besoin de repos, je me jetai sur un sopha et je m’endormis. Au bout de quelques heures, un grand bruit, qui se fit entendre dans ma maison, me réveilla ; je me levai pour aller voir ce qui le causait, et j’aperçus avec beaucoup d’effroi que c’était une troupe de soldats de la garde de Firouzchah : « Suivez-nous, me dit l’officier qui était à leur tête, nous avons ordre de vous conduire au palais. — Quel crime ai-je commis ? lui répondis-je ; de quoi m’accuse-ton ? — C’est ce que nous ne savons pas, répliqua l’officier, il nous est seulement ordonné de vous mener au roi, nous en ignorons la cause ; mais je vous dirai, pour vous rassurer, que si vous êtes innocent vous n’avez rien à craindre : vous avez affaire à un prince équitable qui ne condamne point légèrement les personnes accusées d’avoir commis quelque forfait ; il faut des preuves convaincantes pour le porter à prononcer un arrêt funeste : il est vrai qu’il punit rigoureusement les coupables ; si vous l’êtes, je vous plains. »

Il fallut suivre l’officier. En allant au sérail, je disais en moi-même : « Firouzschah a sans doute découvert l’intelligence que j’ai avec Zélica ; mais comment l’a-t-il apprise ? » Quand nous fûmes dans la cour du palais, je remarquai qu’on y avait dressé quatre potences : je jugeai bien que cela me regardait, et que ce genre de mort était le moindre châtiment que je devais attendre du ressentiment de Firouzschah : je levai les yeux au ciel et le priai de sauver du moins la princesse de Perse.